Il était une fois à Palerme

quattro-canti-via-maqueda-1931[1]Giuseppe A. Samonà

Trois gamins de douze treize ans, l’air indolent, se traînent dans la rue Maqueda, longue, déserte, chaude, il est trois heures de l’après-midi, c’est l’été.  Tout à coup il voient au loin, comme s’il avait surgi du néant, un rat – lui aussi, l’air indolent, se traîne, mais dans la direction opposée, il vient à leur rencontre, son ombre semble remplir toute la largeur de la rue, il est énorme. Les gamins ralentissent, le rat ralentit; ils s’arrêtent, il s’arrête; ils le regardent, il les regarde. L’un d’eux tape du pied, fort, pour dégager la voie. Le rat le regarde, il ne bouge pas. Ils se mettent à taper du pied, fort, tous les trois. Le rat les regarde, se remet en mouvement, doucement mais avec détermination, et toujours dans leur direction. Ils reculent de deux pas – mais gardent les yeux fixés devant eux; ils s’arrêtent, tapent encore du pied, ensemble, plus fort. Le rat continue d’avancer, sans plus s’arrêter, même un peu plus vite. Ils reculent, plus vite. Il avance, plus vite. Ils reculent. Il avance. Ils font demi-tour et commencent à courir, sans se retourner, jusqu’à leur maison – ils ne sauront jamais  ce que fit ensuite le rat.

(GS/SJ)