Nous Marchons

Mr Bé

nousmarchons
nous marchons sachant pourtant que
nos affiches nos slogans ne changeront pas
le monde et cela nous déçoit
nous marchons malgré tout et
des kilomètres de rivage avancent vers nous
la rue est une rivière et nous débordons
nous revenons de beaucoup
nous revenons de longtemps
Ouanessa Younsi dans Foglia – la presse du 26-05-12

(face Bé)

nous revenons de tout / peut-être  même
nous avons / en tout cas / si envie d’en revenir
autant essayer….
et / sûr / les occasions viendront / sinon
les prétextes / désormais…..
nous marchons / malgré tout
pour apprendre à marcher
pour apprendre à mieux revenir de tout
pour finir par revenir /aussi / de nous
et le savoir
et peut-être le vouloir

nous marchons pour nous créer
pour nous comprendre
pour nous expliquer
pour nous justifier d’être
pour nous croire complet
pour nous croire enfin fini
nous marchons pour nous inventer
en croyant nous apprendre
nous marchons pour être différents comme tout l’monde
nous marchons pour se prouver qu’on est pas tout seul
à être unique
nous marchons pour toutes les bonnes raisons
qui le méritent
nous marchons pour apprendre à nager dans une mer
dans une mer de monde
nous marchons / précisément / pour être vague
être marée / être flot

nous marchons notre flot penche
notre flot coule
notre flot joue / parle / communique
nourrit ses parasites / ses épaves

nous marchons
une musique s’insinue / l’air simple
une musique s’infiltre / l’air facile
une musique mijote dans nos casseroles
va s’imposer peut-être à la longue
à l’usure
notre musique
notre musique / érable / veut-être

nous marchons propulsés par nos trop-pleins de printempsève
au bouillir facile en foule
nous marcherons jusqu’à l’évaporation
jusqu’à la décantation au sucre
à notre insu
nous marchons parce que nous l’voulons
parce que nous l’pouvons
parce que nous l’mottons
nous marcherons jusqu’à croire cesser
mais marcher / toujours / davantage
car derrière / immobiles
les millions d’insatisfaits
d’inassouvis / de frustrés
d’incomplets / d’imparfaits
et les millions d’inutiles / de superflus
d’injustifiés
et les millions d’abandonnés / trop vieux
trop laids
immobiles / pour ce printemps / mais
s’entendant presque marcher dans vos pas

nous marchons / sachant mal ce que nous cachons
montrant qu’on l’cache qu’on sache

marchons : pour occuper / pour prendre place
marchons : après rien / avant tout
nous regardant le faire / plein l’écran