Giuseppe A. Samonà
J’ai écrit un texte, cette fois dans ma langue maternelle, l’italien – bien que le titre soit né en français, et en français il est resté : La Remise des chevreuils.
J’ai voulu le traduire en français, traduire en français tout ce qui suivait ce titre en français – je n’y suis pas arrivé.
Je peux écrire en français, comme je le fais en ce moment, je peux traduire vers l’italien, comme je vais le faire dès que j’aurai fini ces lignes « françaises ». Mais traduire vers le français, et de surcroît un texte que j’ai pensé en italien, non posso, je ne peux pas.
J’ai alors effacé le tableau, mon tableau, pour simplement me souvenir d’une idée, comme s’il s’agissait d’un rêve, et essayer de la reproduire en français. Et même si le résultat peut ressembler, ressemble à une traduction – pour qui est à l’aise dans les deux langues –, il ne s’agit là que d’une illusion : j’ai écrit en deux moments différents, et de deux façons différentes, deux textes différents – même si par magie le deuxième texte, en français, paraît une traduction du premier, en italien…
Pourquoi d’ailleurs traduire – ou devrais-je plutôt dire : adapter, réinventer – en français ? Probablement pour la même raison, banale, qui m’a porté à écrire en français : la plupart de mes amis, depuis longtemps, ne lisent pas l’italien, lisent l’anglais, l’espagnol, le français, et entre ces trois langues c’est en français, de loin, que j’arrive à me sentir le plus à l’aise en écrivant (ici et là quelques lettres en anglais, en espagnol me font rêver de pouvoir m’amuser à fond aussi dans ces deux langues, que j’aime autant que le français…)
Bien sûr, j’aime aussi écrire en italien, et comment ! Que ce soit pour traduire – je frémis à l’idée de traduire ces quelques lignes, et qui sait, peut-être là aussi vais-je tout réinventer – ou tout simplement, directement, pour « écrire ». Par ailleurs, parmi les gens qui le lisent, l’italien, et qui ne lisent aucune autre langue, j’ai aussi des amis, des amis qui viennent de loin, d’un temps dans lequel parfois, quand j’y pense, je n’arrive même pas à croire que c’était moi qui vivais, et pourtant ils sont aussi tellement proches, tellement chers, ce temps et ces amis, …
Ecrirais-je pour mes amis ? Je le crois. Ou du moins, je crois c’est une de mes motivations les plus profondes.
Est-il possible d’écrire dans plus d’une langue ? Est-ce possible pour moi ? Peut-être. Ce qui signifie : peut-être oui – mais aussi : peut-être non.
Toutefois, il ne m’est possible de « traduire » que vers une seule langue, et celle-ci est la première dont j’ai appris l’existence : l’italien…
La Remise des chevreuils, comme on pourra le voir (ou comme on l’a déjà vu….), ce ne sont que peu de lignes : mais quel itinéraire déroutant, épuisant, voire parfois douloureux ce fut de le traduire-adapter-réinventer en français…
C’eût même été un itinéraire impossible (et peut-être aurais-je dû le dire d’emblée) si en route je n’avais pas rencontré la complicité d’une amie précieuse, Sophie Jankélévitch, qui m’a aidé à me désintoxiquer, à me séparer, de la version italienne : j’ai commencé à lui envoyer des bribes, des ébauches de phrases, des phrases sur lesquelles je butais, que je n’arrivais pas à terminer, des notes, des idées, elle me les a renvoyées avec des suggestions, je les ai adaptées et les lui ai envoyées à nouveau, avec l’envie, en même temps, de changer d’autres passages que je croyais définitifs, et elle, qui entre temps avait eu aussi des idées, m’a de nouveau envoyé… Vu le caractère inventif et de surcroît pluriel de la procédure, cela tient du miracle que le texte final en français ressemble au texte italien de départ au point de pouvoir être pris pour une traduction.
Ainsi, sans nous en apercevoir, nous nous sommes de fait retrouvés à jouer à quatre mains une valse d’allers et retours, parvenant en quelques jours à façonner et à ciseler un petit texte que je n’avais pas réussi à terminer en plusieurs semaines.
Si j’avais envie d’écrire encore en italien et en français, et si mon amie aussi en avait envie – j’attaquerais probablement le français en commençant par ce jeu.
(p.s. Je viens de finir la traduction de ce texte en italien, et je dois le dire : là aussi j’ai inventé, différemment, je crois, mais j’ai inventé, j’ai été même obligé de parler de vomi, et d’ambroisie…)
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Storia de La Remise des chevreuils
Ho scritto un testo, questa volta nella mia lingua materna, l’italiano – ma il titolo è nato in francese, ed in francese è rimasto: La Remise des chevreuils. (Per chi legge questa traduzione, apparirà un’evidenza, o un indizio: dire La Rimessa dei caprioli è impossibile, è come mettere il vomito al posto dell’ambrosia.)
Ho voluto tradurlo in francese, tradurre in francese tutto quel che seguiva questo titolo in francese – non ci sono riuscito.
Posso scrivere in francese, come l’ho appena fatto per queste righe che sto ora traducendo, posso tradurre appunto in italiano. Ma tradurre verso il francese, e per di più qualcosa che ho pensato in italiano, non posso.
Ho allora cancellato la lavagna, la mia lavagna, per soltanto ricordare un’idea, come si trattasse di un sogno, e cercare di ricrearla in francese. E anche se il risultato può somigliare, somiglia a una traduzione – per chiunque sia a proprio agio nelle due lingue –, ciò è soltanto un’illusione: ho scritto in due momenti diversi, e in due modi diversi, due testi diversi – anche se per magia il secondo testo, in francese, sembra una traduzione del primo, in italiano…
Perché d’altronde tradurre – o dovrei dire piuttosto : adattare, reinventare – in francese ? Probabilmente per la stessa ragione, banale, che mi ha portato a scrivere in francese: la maggior parte dei miei amici, da molto tempo, non leggono l’italiano, leggono l’inglese, lo spagnolo, il francese, e fra queste tre è il francese, di gran lunga, la lingua in cui riesco a sentirmi più a mio agio scrivendo (qui e là qualche lettera in inglese, in spagnolo, mi fa sognare di potermi divertire realmente anche in queste altre due lingue, che amo quanto il francese…)
Certo, mi piace anche scrivere in italiano, e come ! che sia per tradurre, come sto facendo adesso, e con non poco piacere, per queste poche, facili righe francesi – poche, facili: tuttavia (e me ne son reso conto soltanto subito prima d’aver aperto questo inciso!), anche qui sto inevitabilmente finendo con il reinventare… qualche goccia di vomito, qualche altra di ambrosia… –; o che sia, semplicemente, direttamente, per « scrivere ». Per altro, anche fra coloro che lo leggono, l’italiano, e che non leggono nessuna altra lingua, ho amici, amici che vengono da lontano, da un tempo in cui a volte, quando ci penso, stento a credere che ero proprio io quello che ci viveva, eppure sono anche talmente vicini, questo tempo, questi amici, talmente cari…
Scriverei per i miei amici? Credo di sì. O almeno, credo che sia una delle mie motivazioni più profonde.
È possibile scrivere in più d’una lingua ? È possibile per me? Forse. Che significa : forse sì – ma anche : forse no.
Tuttavia, non m’è possibile « tradurre » che verso una sola lingua, e questa la prima di cui ho appreso l’esistenza : l’italiano…
La Remise des chevreuils, come si potrà vedere (o si è già visto), sono solo poche righe : ma che itinerario spaesante, spossante, persino doloroso, è stato il tradurlo-adattarlo-reinventarlo in francese…
Sarebbe stato addirittura impossibile (e forse avrei dovuto dirlo come prima cosa) se in cammino non avessi incontrato la complicità di un’amica preziosa, Sophie Jankélévitch, che mi ha aiutato a disintossicarmi, a separarmi, dalla versione italiana: ho cominciato a mandarle briciole, proposte, frasi sulle quali m’inceppavo, che non riuscivo a concludere, appunti, note, idee – lei me le ha restituite accompagnandole di suggerimenti, io li ho adattati e glieli ho mandati di nuovo, con il desiderio, nel contempo, di cambiare altri passi che credevo definitivi, e lei, che nel frattempo aveva anche avuto altre idee, mi ha a sua volta di nuovo mandato… Considerando il carattere inventivo e per di più plurale del procedimento, è veramente un miracolo che il testo finale in francese somigli al testo italiano di partenza al punto da poter esser preso per una traduzione.
In altri termini, senza accorgercene, ci siamo di fatto ritrovati a suonare a quattro mani un valzer di andate e ritorni, arrivando in qualche giorno a dar forma a un piccolo testo che non ero riuscito a finire in settimane.
Se avessi voglia di scrivere ancora in italiano e in francese, e se la mia amica ne avesse voglia anche lei – attaccherei probabilmente il francese cominciando da questo gioco.