Fulvio Caccia
1er Matin
Quatre heures du matin
La grande maison est silencieuse
Et j’ai les yeux grands ouverts
L’anxiété m’a arraché aux grandes marées
aux récifs du sommeil, à ses comètes crépusculaires
dont la traîne illumine mes chaos malfaisants
J’ai les yeux grands ouverts sur la nuit qui s’en va
coquine, rejoindre ses amants par des chemins de traverse
que je ne soupçonnais même pas.
Et je reste là au mitan de mes songes. Déserté,
immobile voyageur doutant de tout,
même du secret familier
que tu me susurrais naguère à l’oreille
Qu’essayais-tu de me dire ?
Quatre du matin
La grande cuisine de merisier est silencieuse
Le voyageur attend la translation de l’aube
Qui se charge d’oiseaux et tisse déjà entre eux
des balançoires invisibles : arbres à musique
vers lesquels ils s’élancent tout heureux
d’anticiper la lumière, là
où justement le sentier bifurque
pour me ramener vers toi
Car tu es et tu n’es pas
Dans les bois dont les racines aux rêves s’enchevêtrent
au cœur de la ville blanche adossée à la colline
Silence de ton visage, vertige du nom.
Mais voici que tu parles :
« Je suis celle qui habite de l’autre côté,
Et tu ajoutes presque fière, la voisine la solitude
l’habitude, la respiration enamourée »
Je cligne des yeux
la nuit le jour
Comment savoir si tu mens ?
Me provoquerais-tu encore
pour me tirer de ma nuit
pour venir te chercher ?
Cher petit animal tremblant debout dans le sentier
tous les sens déployés
je connais tes ruses, tes faire semblants
tes astuces, tes pauses
Tu n’es plus au bout du chemin
comme tu veux me le faire accroire
Tu es repartie ailleurs déjà, « pour m’attendre, dis-tu. »
Pour m’atteindre ?!
Pourquoi ?
Pourquoi recommences-tu ?
Pourquoi es-tu revenue ?
A quoi joues-tu ? Quel est ton but ?
Tu veux que je te suive, que je m’éprenne de toi ?
Tu souhaites me perdre encore dans le sentier aveuglant ?
Dis-moi. Parle!
Manifeste-toi au lieu de t’embusquer dans ton silence,
ton silence chatoyant dont tu te drapes vestale
savourant par avance le moment où à nouveau
je mettrai mes pas dans les tiens,
mes mots dans ta bouche : ceux que tu n’as jamais prononcés.
Je ne suis pas dupe.
Tu m’embobines, me roule dans la farine
Comme toujours
Je ne suis pas dupe, je sais tout cela depuis belle lurette
Je ne suis pas dupe.
Trois fois, je le répète et trois fois je succombe
Trois fois, je me trahis !
A quoi bon ?
Va !
Tu as gagné, tu connais mes points faibles mes anxiétés
à vouloir coûte que coûte ériger ces paroles
comme des stèles autour du cercle vide où tu me convies.
Tu connais tout et plus encore : les vers que je n’ai pas couchés
sous ton iris frémissant, ces oriflammes pour appeler le vent.
Tu devines tout, tu n’ignores pas que je marche déjà vers toi.
Je suis à nouveau pris au piège.
« Ce n’est pas un piège ! me cries-tu,
NON !
Tu n’as donc pas encore compris !
Je ne suis même pas un miroir aux alouettes.
Et d’ailleurs tu n’es pas une alouette !
Tu es
le rempart, le silène
le développement de l’action
l’imagination au parloir
l’étendue de la mer
les respirations du désert
l’envol solitaire de la buse
le silence des miroirs, l’intensité
la fuite, le chatoiement de la chaleur
la poussière sur la table
l’espoir, la continuité, l’ongle cassé ce soir
la poursuite du bonheur, l’astre, la braise de la pinède
la chute du dieu soleil, sa rédemption, sa gloire et son corps rendu
à la multitude, à son opprobre, à sa fascination, à son exultation à l’infini,
Tu es
l’alibi, mon double, mon prolongement, ma désespérance,
la force de gravitation, l’illusion, la dune, les atolls, les coraux rongés
par les algues toxiques, l’effondrement de la foi, sa résurgence, la poursuite, la puissance, le recommencement
Tu es.
Basta ! »
1er Matin
Quatre heures du matin
La grande maison est silencieuse
Et j’ai les yeux grands ouverts
L’anxiété m’a arraché aux grandes marées
aux récifs du sommeil, à ses comètes crépusculaires
dont la traîne illumine mes chaos malfaisants
J’ai les yeux grands ouverts sur la nuit qui s’en va
coquine, rejoindre ses amants par des chemins de traverse
que je ne soupçonnais même pas.
Et je reste là au mitan de mes songes. Déserté,
immobile voyageur doutant de tout,
même du secret familier
que tu me susurres à l’oreille
Qu’essaies-tu de me dire ?
Quatre du matin
La grande cuisine de merisier est silencieuse
Le voyageur attend la translation de l’aube
Qui se charge d’oiseaux et tisse déjà entre eux
des balançoires invisibles : arbres à musique
vers lesquels ils s’élancent tout heureux
d’anticiper la lumière, là
où justement le sentier bifurque vers celui
Car tu es et tu n’es pas
Dans les bois dont les racines aux rêves s’enchevêtrent
au cœur de la ville blanche adossée à la colline
Silence de ton visage, vertige du nom.
Mais voici que tu parles :
« Je suis celle qui habite de l’autre côté,
Et tu ajoutes presque fière, la voisine la solitude
l’habitude, la respiration enamourée »
Je cligne des yeux
la nuit le jour
Comment savoir si tu mens ?
Me provoquerais-tu encore
pour me tirer de ma nuit
pour venir te chercher ?
Cher petit animal tremblant debout dans le sentier
tous les sens déployés
je connais tes ruses, tes faire semblants
tes astuces, tes pauses
Tu n’es plus au bout du chemin
comme tu veux me le faire accroire
Tu es repartie ailleurs déjà, « pour m’attendre, dis-tu. »
Pour m’atteindre ?!
Pourquoi ?
Pourquoi recommences-tu ?
Pourquoi es-tu revenue ?
A quoi joues-tu ? Quel est ton but ?
Tu veux que je te suive, que je m’éprenne de toi ?
Tu souhaites me perdre encore dans le sentier aveuglant ?
Dis-moi. Parle!
Manifeste-toi au lieu de t’embusquer dans ton silence,
ton silence chatoyant dont tu te drapes vestale
savourant par avance le moment où à nouveau
je mettrai mes pas dans les tiens,
mes mots dans ta bouche : ceux que tu n’as jamais prononcés.
Je ne suis pas dupe.
Tu m’embobines, me roule dans la farine
Comme toujours
Je ne suis pas dupe, je sais tout cela depuis belle lurette
Je ne suis pas dupe.
Trois fois, je le répète et trois fois je succombe
Trois fois, je me trahis !
A quoi bon ?
Va !
Tu as gagné, tu connais mes points faibles mes anxiétés
à vouloir coûte que coûte ériger ces paroles
comme des stèles autour du cercle vide où tu me convies.
Tu connais tout et plus encore : les vers que je n’ai pas couchés
sous ton iris frémissant, ces oriflammes pour appeler le vent.
Tu devines tout, tu n’ignores pas que je marche déjà vers toi.
Je suis à nouveau pris au piège.
« Ce n’est pas un piège ! me cries-tu,
NON !
Tu n’as donc pas encore compris !
Je ne suis même pas un miroir aux alouettes.
Et d’ailleurs tu n’es pas une alouette !
Tu es
le rempart, le silène
le développement de l’action
l’imagination au parloir
l’étendue de la mer
les respirations du désert
l’envol solitaire de la buse
le silence des miroirs, l’intensité
la fuite, le chatoiement de la chaleur
la poussière sur la table
l’espoir, la continuité, l’ongle cassé ce soir
la poursuite du bonheur, l’astre, la braise de la pinède
la chute du dieu soleil, sa rédemption, sa gloire et son corps rendu
à la multitude, à son opprobre, à sa fascination, à son exultation à l’infini,
Tu es
l’alibi, mon double, mon prolongement, ma désespérance,
la force de gravitation, l’illusion, la dune, les atolls, les coraux rongés
par les algues toxiques, l’effondrement de la foi, sa résurgence, la poursuite, la puissance, le recommencement
Tu es.
Basta ! »